Lettre ouverte publiée dans le Journal de Québec (19 oct. 2020).
La Coalition des psychologues du réseau public québécois a écouté avec intérêt le débat portant sur la santé mentale à l’Assemblée nationale le 7 octobre dernier. Ce débat incluait plusieurs propositions des partis d’opposition, visant à rendre plus accessibles les services en santé mentale. Malheureusement, toutes ces propositions ont été rejetées... même celle visant à ce que les psychologues, les travailleurs sociaux et les psychoéducateurs ne soient pas délestés de leur poste en santé mentale lors de la deuxième vague de COVID-19, afin de pouvoir continuer à s’occuper du bien-être psychologique de la population souffrante.
Pourtant, selon une étude récente, 22% des Québécois présentaient des symptômes compatibles avec un épisode de dépression majeure ou un trouble d'anxiété généralisé en septembre 2020. Il s'agit de plus d'un million d'adultes québécois. Plus encore, cette statistique ne tient pas compte des enfants et des adolescents qui sont également souffrants depuis le début de la pandémie: 56% des parents rapportent que l'état psychologique et émotionnel de leur enfant s'est détérioré.
ale, 8 octobre 2020). Cette déclaration est troublante et fausse en vertu de la loi 21. Il va sans dire que tous les intervenants psychosociaux sont essentiels et ont un rôle crucial à jouer pour promouvoir le bien-être de la population, mais ils ne sont pas interchangeables. Ils sont plutôt complémentaires.
Alors qu'une rencontre de soutien ou un appel sur une ligne d'écoute peuvent être très aidants dans un moment de détresse, cela ne peut en aucun cas remplacer une psychothérapie qui est un acte spécifique et réservé. La psychothérapie ne se limite pas à de la psychoéducation, à de l'intervention de soutien ou à la présentation de techniques. La psychothérapie est un traitement spécifique qui vise à amener un changement psychologique profond et durable, et dont l’efficacité a été prouvée scientifiquement. Selon le rapport de l’INESSS (2018), 80% des professionnels habilités à faire de la psychothérapie au Québec sont des psychologues.
Les psychologues ne devraient pas être vus comme une dépense, mais comme un investissement qui rapporte bien plus que ce qu’il coûte. Pensez aux économies reliées à l’absentéisme au travail, au décrochage scolaire, aux visites à l'urgence, aux hospitalisations, aux suicides, aux problèmes de toxicomanie, à la violence et plus encore.
Le gouvernement prévoit qu’il manquera près du tiers des psychologues dans le réseau public d’ici 3 ans (Morency & Roy-Lemire, 2018). Ce sont les gens les plus vulnérables qui en payeront le prix en ne recevant pas le type de service dont ils ont vraiment besoin. Comme l’a dit notre premier ministre, il est de notre devoir de bien gérer les fonds publics. Toutefois, perpétuer des portes tournantes et l’attente de soins n’est pas rentable. Soigner et aider avec une vision à long terme, ça l’est. La situation est critique et exige des actions immédiates.
Pour le moment, l’accès aux services en santé mentale se trouve grandement affecté par le manque d’actions visant à contrer la pénurie de psychologues dans le réseau public. Qu'en pense la population? Qu'en pensent les parents qui n'ont pas les moyens de consulter un psychologue au privé pour leur adolescente ayant développé de l'anorexie pendant la pandémie?
Il est temps de permettre à ceux qui en ont besoin d'avoir accès à l'expertise des psychologues via le réseau public, afin d’éviter que leur condition ne se détériore pendant la pandémie.
Un psychologue n'est pas un luxe, mais une nécessité rentable.
La Coalition des psychologues du réseau public québécois
Karine Gauthier, M.Ps., Ph. D., psychologue/neuropsychologue
Catherine Serra-Poirier, Psy. D., Ph. D., psychologue
Marc-André Pinard, D. Psy., psychologue
Connie Scuccimarri, Ph. D., psychologue
Béatrice Filion, D. Psy., psychologue
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